Mise à jour le 07 mai 2020

 

Spectacle, cinéma, audiovisuel : soyons vigilant-e-s sur la mise en œuvre des annonces !

Pour annoncer son plan de soutien au secteur culturel, le Président de la République a choisi de réunir le 6 mai autour de lui en visio-conférence une douzaine de personnalités du monde des arts et du spectacle. Drôle de choix plutôt que de recevoir les organisations représentatives. Toujours plus à l’aise à rencontrer les premiers de cordée plutôt que les anonymes ?

Pourtant, la culture ne vit que grâce aux travailleuses et travailleurs de ce secteur indispensable à notre société. Les projets ne se réalisent que si les entreprises qui les portent en ont les moyens. Ne pas discuter avec leurs représentants (à travers tous leurs métiers) est une bien mauvaise méthode pour construire l’avenir. Notre pacte social et notre démocratie consistent à entendre, discuter et négocier avec celles et ceux qui représentent réellement leurs pairs, construisent et portent les revendications.

L’annonce de la prolongation des droits à l’assurance chômage des salarié-e-s intermittent-e-s du spectacle jusqu’à fin août 2021 démontre que la très large mobilisation collective a porté ses fruits. Cette annonce ne permet pas de résoudre toutes les difficultés, notamment pour les nouveaux entrants, les personnes en rupture de droits, les personnes de retour de congé maternité ou longue maladie, les franchises. Nous agirons pour qu'elle soit concrétisée et complétée. Les artistes et technicien-ne-s intermittent-e-s du spectacle sont par ailleurs solidaires de tous les travailleurs précaires qui revendiquent des prolongations de droits et l’annulation de la réforme de l’assurance chômage.

D'autres sujets doivent être abordés comme l’adaptation indispensable des règles de la sécurité sociale pour permettre aux salarié-e-s d’accéder, pour la période à venir à des indemnités journalières en matière de maladie, de maternité ou encore d’invalidité.

Nous attendions des annonces précises et chiffrées sur les efforts financiers qui seraient mis en œuvre pour faire face à la crise sans précédent des secteurs culturels. À l’exception de la dotation de 50 millions d’euros pour le Centre National de la Musique à l’attention du secteur musical, les annonces formulées n’ont pas été chiffrées et leur financement semble dépendre d’autres acteurs (collectivités territoriales, assurances, etc.). Des mesures ont été annoncées pour permettre d’assurer les tournages de cinéma et d’audiovisuel, il faudra en regarder la mise en œuvre.

Il faudra des mesures concrètes pour que les mesures envisagées soient à la hauteur des enjeux économiques et d’emploi en présence. Nous prenons acte toutefois de l’engagement pris par le Président de la République sur la transposition rapide des directives SMA (services médias audiovisuel et droits d’auteurs) et Droits d’auteurs, essentielles pour le secteur, ainsi que la mise à contribution rapide des GAFA au financement de la création. Il est évident que si, dans la période actuelle où leurs œuvres sont exploitées partout sur les réseaux, les autrices, auteurs et les artistes en tiraient des revenus, leur situation serait moins délicate.

Alors qu’Emmanuel Macron souhaite mettre les artistes et les technicien-ne-s au « travail » pour réaliser des ateliers périscolaires pour mettre en œuvre « une révolution artistique et culturelle », une réinvention de « notre été inventant et culturel », nous rappelons que les artistes et technicien-ne-s exercent, nombreux, depuis longtemps leur métier ailleurs que sur les plateaux, jouant dans les écoles, présentant des extraits, rencontrant les élèves, il n'y a pour l'instant aucune proposition pour les recruter ou de budgets pour rémunérer leur travail, ni de précisions sur le cadre de ces emplois. Quant à enseigner notre art à des enfants, nous rappelons que tous ne sont pas nécessairement formés ni compétents pour le faire.

Le ministre de la Culture a annoncé un agenda semé de nombreuses incertitudes. Entre les reprises des répétitions et des « fonctions administratives » le 11 mai, tout en rappelant l’interdiction des rassemblements de plus de 10 personnes et le respect impératif des gestes barrières, au milieu des injonctions contradictoires, on y perd son latin. Les salarié-e-s sont plus que jamais concerné-e-s et veilleront aux conditions sanitaires de la reprise. Il est donc indispensable de se doter d’un comité sanitaire et social, instance de dialogue social qui regroupe les acteurs de la prévention pour anticiper et réussir cette reprise, d’autant plus dans des lieux accueillant du public.

Nous appelons urgemment le Gouvernement à réunir les organisations syndicales et patronales autour de toutes ces questions. Nos secteurs ont besoin d'un cadre concerté de reprise puis de relance pour que les promesses d'aujourd'hui se traduisent en actes forts pour le service public de la culture et en financements durables de la part de l'Etat.