Mise à jour le 25 novembre 2021

 

REVOYURE : SILENCE GÊNANT DES MINISTÈRES DE LA CULTURE ET DU TRAVAIL !

Le 11 mai dernier, les deux ministres de la Culture et du Travail avaient annoncé une série de mesures de sortie de crise notamment pour les artistes et les technicien·ne·s intermittent·e·s du spectacle. Nous en avions critiqué les limites : très faibles mesures pour l’emploi, les jeunes cantonnés à des annonces de pure communication, insuffisance des décisions de prolongation des droits à l’assurance chômage pour les intermittent·e·s du spectacle les plus touché·e·s par la crise, absences de mesures adéquates pour les enseignant.e.s artistiques et les artistes auteurs.

Un engagement de « revoyure » avait été pris pour l’automne par les deux ministres. Après avoir insisté pour que ce rendez-vous soit tenu, deux réunions expresses d’une heure ont finalement été organisées en présence du ministère de la Culture et du ministère du Travail au cours desquelles peu (très peu) de réponses ont été apportées.

Nous avons demandé la prolongation des mesures « Fonpeps renforcé » de soutien à l’emploi (petites salles et tournées) pour l’année 2022, qui paraît indispensable au regard des incertitudes sanitaires en cours. Invoquant l’impossibilité de dresser le bilan de la consommation de ces crédits avant fin janvier et de ne pas pouvoir se prononcer avant, le ministère n’a pas répondu à cette demande.

Nous avons demandé un bilan chiffré du plan “1 jeune, 1 solution” qu’Elisabeth Borne s’était engagée à orienter pour partie à la culture et au spectacle et qui devait permettre le rapprochement entre les jeunes artistes et techniciens vers des offres d’emploi ou d’apprentissage. À ce jour, aucune donnée n’est disponible dixit le ministère du Travail. Pas plus de chiffres nous a été communiqué sur le nombre de jeunes qui ont bénéficié d’une ouverture de droits aux annexes 8 et 10 avec 338 heures ou sur celles et ceux qui n’ont pu atteindre ce seuil dans la période.

Face au risque de désinsertion professionnelle, nous avons rappelé la nécessité de revenir sur la loi “liberté de choisir son avenir professionnel” pour permettre à nouveau aux professionnels du spectacle de se voir financer des formations longues pour évoluer professionnellement dans le secteur. Pas de réponse non plus sur ce point.

Nous avons analysé les mesures faisant suite à la prolongation des droits à l’assurance chômage des intermittent·e·s du spectacle et présenté les insuffisances des arbitrages retenus. Les ministères communiquent depuis quelques jours sur le fait que le retour à la « normale » est proche. Mais les chiffres présentés en bilatérale et communiqués à la presse montrent surtout que le premier semestre 2021 a été une catastrophe : un volume d’heures du travail réduit à 50% dans le spectacle vivant et à 80 % dans le champ du spectacle occasionnel (comités des fêtes, etc.). Les ministères font semblant de croire que l’amélioration à partir de l’été est durable, alors même que la fréquentation des salles n’est pas suffisante, et de même font semblant de croire qu’il est suffisant d’avoir « une solution » au 1er janvier 2022 pour chaque intermittent·e. Pourtant, la baisse de revenu va être double pour beaucoup : une baisse des revenus du travail par une baisse d’activité, et une baisse du niveau d’allocations pour les mêmes, les plus touchés, parmi les artistes (notamment dans la musique) et les technicien·ne·s. Les enseignant·e·s artistiques risquent de subir une double peine plus terrible, pour avoir travaillé en parallèle en conservatoire, certain·e·s risquent de se retrouver avec une très faible allocation au régime général d’assurance chômage, celui-là même durci par la réforme en cours.

La seule bonne nouvelle pour le moment concerne une amélioration de l’accès aux indemnités sécurité sociale des congés maladie/maternité. Le 18 novembre dernier, est enfin paru un décret portant de trois mois à un an la période permettant de maintenir les droits acquis. Cette mesure était annoncée comme “imminente” par le Premier Ministre depuis le 11 mars, elle concernera tout·e·s les travailleur·se·s précaires, et plus seulement les intermittent·e·s du spectacle, à qui elle s’appliquait depuis juin. Cette victoire est à partager avec le mouvement unitaire du printemps, notamment avec le collectif des Matermittentes. Ce décret ne règle pas pour autant les nombreuses difficultés de traitement des dossiers dans les CPAM.

Quant aux artistes autrices et auteurs, ils n’ont plus accès à aucun soutien, le fonds de solidarité ayant été interrompu. Alors même qu’une extrême précarité s’abat sur la profession, la réforme sur le transfert du recouvrement des cotisations à l’Urssaf Limousin continue de les pénaliser avec la multiplication d’appels de cotisations sans rapport avec leur niveau de revenus et le dysfonctionnement de la plateforme en ligne.

Nous appelons les ministres à revoir leurs copies : des mesures ont été prises pour accompagner le secteur pendant la crise, mais celle-ci n’est pas terminée. Un vaste plan de soutien à l’emploi (et à l’activité, des autrices et auteurs) est encore nécessaire. L’adaptation de la protection sociale doit être prolongée jusqu’à un an après la fin des effets de la crise.

Tenir la promesse de ne « laisser personne sur le bord du chemin » repose sur la poursuite et l’amélioration des annonces.